CARENCE ET PLÉNITUDE
Enrique Martínez LozanoJn 6, 1-15
Dans le récit de Jean de la "multiplication des pains" on remarque des réminiscences anciennes-testamentaires, telle que l'allusion à "l'herbe", le pain "d'orge", et le nombre "cinq", "cinq mille" et "douze".
Pour ceux qui connaissaient l'Ancien Testament, toutes ces données étaient des clins d'oeil éloquents: "l'herbe" rappelle le Psaume 23, qui chante à Yhwh comme "pasteur" du peuple; les "pains d'orgue" rappelleraient le miracle de la multiplication, attribuée au prophète Élisée (2 Rois 4:42); et aussi bien le "cinq" (et ses multiples) comme le "douze" sont allusion directe à Israël, composé sur les douze tribus et basées sur les cinq livres de la Torah.
Avec tout cela, l'évangéliste présente Jésus comme le "Bon Pasteur" -il y reviendra largement au chapitre 10 de son récit-, le "nouveau prophète" qui nourrit son peuple jusqu'à le satisfaire.
Souvent, l'existence humaine semble une course à la recherche de ce qui nous rassasiera d'une manière définitive. Dans cette course des éléments qui nous sont familiers sont en jeu: le besoin, l'anxiété, le vide, la recherche, l'insatisfaction... Eux tous, à première vue, nous repportent à la perception de nous-mêmes en tant que des êtres avec des carences. Cette carence serait, donc, celle qui déclencherait tout le processus de recherche.
Mais il y a aussi une autre lecture sur un niveau plus profond. S'exprimant sous une "forme" avec de carences, nécésiteuse et vulnérable, nous sommes, cependant, plénitude, douée d'un dynamisme que nous percevons comme désir profond.
La nôtre est une réalité profondément paradoxale, que nous devons lire correctement pour éviter de tomber dans la confusion ou de nous perdre sur la route. Nous perdons, aussi bien quand nous nous réduisons à la carence, comme lorsque nous le nions.
La Sagesse nous fait voir que nous sommes plénitude toujours sauve, qui s'exprime sous une "forme" (personnalité) concrète, qu'il est nécessaire d'en prendre soin sans déconnecter de notre véritable identité.
Lorsque nous vivons comme ça, ce n'est pas l'anxiété qui régit notre existence, parce que nous avons découvert que déjà nous sommes et tout ce que nous cherchons, mais que l'action surgit du dynamisme propre à la Vie qui nous définit.
Enrique Martínez Lozano
Traducción: María Ortega