AU DELÁ LA LITTÉRALITÉ
Enrique Martínez LozanoJn 6, 51-58
Au cours du développement du chapitre 6 du quatrième évangile on perçoit un point d’inflexion important: on passe de parler de Jésus comme “pain” (message) qui nourrit, à parler de “chair” et, donc, de sacrement. L'invitation n’est plus à “croire” en lui, mais à “le manger”, pour accéder à la vie.
Sans doute, un tel changement est le travail d'un rédacteur ultérieur, soucieux de donner un ton plus sacramentaliste aux communautés johanniques elles-mêmes. Pour cela, il a jugé opportun de transformer le message originel centré sur la parole de Jésus comme source de la vie, en cet autre qui le présente comme “nourriture”, à travers le signe (sacramental) du pain.
L'insistance du commentateur sur le symbolisme du “pain-chair" se trouve à la base en grande partie de la théologie ultérieure, ainsi que de la piété eucharistique elle-même quand, négligeant son symbolisme, on a vécu souvent d’une manière grossièrement matérialiste.
Depuis la perspective non-duale, l'eucharistie acquiert une profondeur et une beauté qui passent inaperçues quand elle est vécue comme un simple rite qui se tient à la littéralité des mots. Dans ce cas, la façon de le présenter, dans des sermons et des catéchismes, bordait l’image de cannibalisme.
Le littéralisme dépassé, tout récupère cohérence et profondeur: le pain, aliment de base dans notre culture, représente toute la réalité. Quand Jésus dit: "Ceci c’est moi", il exprime la vérité de la non-séparation, comparable à cette autre affirmation: “Le Père et moi nous sommes un".
Tout est en tout: voilà le sens profond de l'Eucharistie. Pour les chrétiens, Jésus est la référence; il est le "porte d’entrée" pour accéder à la vérité que nous partageons tous. Mais, une fois dépassées tant la littéralité comme la dualité, ça n’a pas de sens d’absolutiser cette référence. Voilà ce qui est arrivé lorsque on a pris littéralement ces paroles d’un commentateur ultérieur, on les a attribuées directement à Jésus et elles ont été comprises dans sa plus grossière matérialité.
Dans cette nouvelle perspective, il est clair que l'accent ne soit pas mis sur la “chair”, mais sur l'unité: “Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui." Tout le message de Jésus vise cette "inhabitation" (unité): Jésus et nous nous sommes pas-deux.
Enrique Martínez Lozano
Traducción: María Ortega