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L'EAU ET LA LUMIERE RENDENT POSSIBLE LA VIE. LE PAIN L'ENTRETIENT

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Jn 6, 24-35

 

CONTEXTE

Nous continuons le chapitre 6 de l'évangile de Jean, mais nous avons passé sous silence le récit de la traversée du lac et l'apparition de Jésus marchant sur les eaux.

La lecture d'aujourd'hui aborde de front la discussion avec les Juifs. Au verset 59 il est dit expressément que la rencontre a eu lieu dans la synagogue de Capharnaüm. En tout cas nous avons affaire à une discussion longue et dure, au cours de laquelle Jésus concrétise et approfondit les exigences de la vie de disciple. Le processus sera le suivant : enthousiasme, doute, déception, désillusion, opposition, rejet, abandon.

 

EXPLICATION

Jésus ne répond pas à la question : « Comment et quand es-tu arrivé ici ? » mais aux intentions véritables des gens. De cette façon il distingue ce qui n'a aucune importance (comment il est arrivé), ce qui a une relative importance (la nourriture matérielle) et ce qui en a vraiment (l'engagement humain auquel il veut les amener).

Vous me cherchez, non parce que vous avez vu des signes, mais parce que vous avez mangé du pain à satiété. Le « signe » avait été une invitation à partager. Mais eux n'y ont vu que la satisfaction de leur besoin. Ils ont vidé le « signe » de son contenu.

Cette recherche de Jésus n'est pas correcte, parce qu'ils n'en attendent que des sécurités. Jésus va droit à l'essentiel et démasque leurs intentions. Ce n'est pas lui qu'ils recherchent mais le pain qu'il leur a donné. Ils ne le recherchent pas pour leur avoir ouvert les portes d'un avenir plus humain.

Ces mots mis par Jean dans la bouche de Jésus, critiquent la religion de toutes les époques. Toutes les religions en arrivent à manipuler Dieu pour le mettre à leur service de façon intéressée.

Travaillez non pas pour la nourriture périssable, mais pour la nourriture qui demeure et donne la vie définitive. L'offre de travailler pour la nourriture qui donne Vie résume tout son message. Elle vaut autant pour cette époque-là que pour aujourd'hui.

Il essaie de mettre en garde contre la facilité qu'a l'homme de gâcher sa vie en se laissant prendre par le purement matériel ou en se laissant emporter par le sensible. La recherche du pain véritable exige des efforts. C'est un chemin de lutte, de dépassement de soi, de purification, de renouvellement, de mort et de nouvelle naissance.

Cette nourriture qui demeure, Dieu la donne gratuitement, Jésus a découvert ce don et déployé sa Vie humaine véritable.

Sans nourriture, impossible de parcourir aucun chemin. C'est la raison pour laquelle il faut l'écouter quand il évoque une autre nourriture qui est celle qui me sauve. Il faut aussi travailler pour la nourriture périssable, mais ce ne doit pas être le but ultime de notre travail.

Les juifs montrent un certain intérêt pour être mis au courant, mais comme il sera démontré par la suite, cet intérêt est purement superficiel. Habitués à se mouvoir à coups de préceptes, ils demandent des normes à Jésus. Ils sont incapables d'imaginer que Dieu puisse donner quelque chose pour rien.

Le travail que désire Dieu, c'est que vous donniez votre adhésion à celui qu'il a envoyé. Connaître ce que Dieu attend de nous, semble être le vrai chemin pour arriver, mais cet intérêt-là n'est qu'apparent, chez les Juifs et chez nous. En réalité, ce que Dieu veut ou ne veut pas ne nous intéresse pas trop. Ce qui nous intéresse vraiment c'est ce que nous attendons de Dieu. Nous avons fabriqué un Dieu à notre mesure pour garantir des sécurités.

De toutes les manières Jésus leur dit ce que Dieu attend d'eux : qu'ils croient. L'éternelle discussion entre la foi et les œuvres est définitivement dépassée : croire est la première et lus importante tâche que Dieu attend de nous.

Mais l'institution arrive tout de suite et nous dit : ce que veut Dieu c'est ceci et cela ; qui n'est pas autre chose que ce qui intéresse les dirigeants de service. Jésus n'est pas venu donner de nouvelles normes morale ; il est venu nous apprendre le chemin de la Vérité et de la vraie Vie.

Ce que j'ai à « faire » dans la pratique de chaque jour, je dois le découvrir moi, Il ne faut pas que ça m'arrive du dehors comme une programmation, je ne dois pas être un robot où a été introduit un programme. Ce que veut Dieu c'est que nous parvenions à notre plénitude, et la « feuille de route » pour y arriver est à l'intérieur de nous, pas en dehors.

Ce que nous sommes compte pour Dieu bien davantage que ce que nous faisons. Une fois encore apparaît notre aveuglement fondamental lorsque nous sommes préoccupés par ce que Dieu veut que nous fassions ou cessions de faire. Une seule chose est fondamentale : croire.

Mais là-dessus aussi nous avons déformé ce qu'est croire : nous l'assimilons à l'acceptation d'une série de vérités théoriques, et cela nous suffit.

Dans la Bible, croire c'est faire confiance à...C'est ce que Jésus demande à ses auditeurs. Mais nous déformons aussi cette confiance pour la convertir en une espérance que Dieu satisfasse nos désirs ; au lieu de faire confiance à ce que Dieu veut pour nous et donc découvrir cette volonté, non comme si elle venait du dehors, mais comme insérée à la racine de notre être.

La clef est de savoir passer d'un pain à un autre pain.

Quel signe réalises-tu pour qu'en le voyant nous croyions en toi ? Quelles œuvres fais-tu ? Exiger un signe pour qu'ils croient, est la meilleure démonstration qu'ils ne croient pas. Ils seraient disposés à accepter un Messie, semblable à Moïse, qui montrerait ce qu'il vaut par des prodiges (c'est pour ça qu'ils voulaient le faire roi). La manne était considérée comme le plus grand des miracles. Ils exigent de Jésus qu'il légitime ses prétentions grâce à un prodige semblable ou plus grand.

Mais la Vie promise par Jésus ne vient pas du dehors ni de façon spectaculaire. Elle est en chacun et se manifeste dans la vie quotidienne, comme un amour désintéressé, comme préoccupation pour l'autre.

Moïse ne vous a pas donné le pain du ciel ; non, c'est mon Père qui vous donne le vrai pain du ciel. Le premier n'était rien de plus qu'un symbole. La réalité est en Jésus, le vrai pain du ciel, qui alimente la vraie Vie. Rappelons-nous que les rabbins considéraient la Torah comme le pain que Dieu leur avait procuré. Maintenant la seule Loi qui sauve, c'est Jésus.

Donne-nous toujours de ce pain-là. Réaction apparemment sincère mais radicalement erronée. Ils l'appellent Seigneur, ils croient d'une certaine manière en ses paroles. Ils attendent qu'il satisfasse leurs désirs, mais ils ne li donnent pas leur adhésion, ils recherchent seulement un salut qui leur arrive de dehors sans qu'ils n'aient rien à faire. Ce dont ils ont l'intention c'est de profiter d'une personne, qui a donné des preuves de sa capacité de sauver.

Je suis le pain de Vie. Dans tous les grands discours rencontrés dans cet évangile, il est fait référence à la Vie, avec une majuscule. Il s'agit d'une réalité que nous sommes incapables d'expliquer avec des mots, ni ranger dans des concepts humains. Il n'y a qu'à travers des symboles et des métaphores qu'il est possible d'indiquer la route vers un vécu, seule manière de découvrir de quoi nous parlons.

« Je suis » est chez Jean la manifestation la plus haute de la conscience qu'avait Jésus de celui qu'il était. Chacun de nous doit découvrir celui que nous sommes en vérité, comme l'a découvert Jésus. Je suis le même que celui qu'était Jésus.

Celui qui vient à moi n'aura plus faim, celui qui croit en moi n'aura plus jamais soif. Que signifie « aller à lui, croire en lui » ? C'est ici que s'enracine tout le cœur du discours. Il ne s'agit pas de rien recevoir de Jésus, mais de découvrir que tout ce qu'il avait, je l'ai moi aussi.

Ce que voulait Jésus, c'était que les êtres humains découvrent qu'on pouvait vivre dans une perspective différente, qu'atteindre la plénitude humaine signifiait découvrir ce qu'est Dieu en chacun et qu'une fois découvert ce don total (Vie), nous répondions comme a répondu Jésus.

Ce que propose Jésus va contre toute logique rationnelle. Ce qu'il nous dit c'est que le pain qui donne vie n'est pas le pain qu'on reçoit et qui se mange, mais le pain qui se donne. Si tu te convertis et deviens le même pain que lui, ce don se convertira en Vie.

Jésus n'invite pas à chercher la perfection elle-même, sinon à développer la capacité de se donner soi-même. S'il recherche sa perfection, l'homme édifie son propre piédestal pour y placer son faux moi. Il n'y a qu'en se donnant qu'il dépassera son individualisme égoïste et atteindra unité et plénitude.

 

Méditation-contemplation


Avoir faim ou avoir soif est une grande métaphore appliquée à la vie spirituelle

La vie spirituelle aussi a besoin d'être alimentée.

 

Jean présente Jésus comme la nourriture qui donne Vie.

Pour qu'il nous alimente, il me faut le manger et le boire.

Mais il faut surtout que je l'assimile

Pour découvrir en moi ce qui lui a donné cette Vie-là, à Lui.

 

Cette Vie-là est la vie même de Dieu qui nous a été communiquée.

Comme Jésus, nous avons à la découvrir

Et la laisser nous traverser depuis le plus profond de l'être.

Cette Vie-là est un don, mais il nous faut l'accepter personnellement.

 

Texte de Fray Marcos

(Trad. Maurice Audibert)

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