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UNE RELATION D'AMOUR, PAS COMMERCIALE

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Jn 2, 13-25

Le mot de « purification du temple » est inadéquat en l'occurence, car il ne s'agit pas de purification mais de substitution. Ce passage sur le Temple, nous l'avons compris de façon trop simpliste. Une fois encore, l'exégèse peut nous aider à découvrir la signification profonde du récit.

En bon Juif qu'il était, Jésus a passé sa vie spirituelle aux alentours du temple; mais sa fidélité religieuse lui a fait comprendre que ce qui se passait là n'était pas ce qu'attendait Dieu des êtres humains. Il est très important de se rappeler que lorsque fut écrit l'évangile, le temple n'existait plus et la caste sacerdotale n'avait aucune influence sur le judaïsme. Mais le christianisme était alors devenu une religion et pouvait céder à la tentation de répéter cette façon de rendre un culte à Dieu.

Il est presque certain qu'il se soit passé quelque chose de semblable à ce qui nous est raconté, car le récit correspond parfaitement avec les critères d'historicité. D'une part, les quatre évangiles le rapportent. D'autre part c'est une chose que les premiers chrétiens (tous juifs) auraient pu interpréter comme ternissant la réputation de Jésus: personne n'aurait pu l'inventer si ça ne s'était pas passé et que ça ne figure pas dans les sources.

On nous a redit sur tous les tons que ce qu'a fait Jésus dans le temple était de le purifier d'une activité commerciale illégale et abusive. Selon cette version, l'intention de Jésus était de faire qu'on aille au Temple pour prier, pas pour vendre et acheter.

Ceci n'a aucun fondement, vu que ce que faisaient là vendeurs et changeurs, était absolument indispensable au bon déroulement de l'activité du temple. On y vendait des boeufs, des brebis et des colombes qui étaient la base des sacrifices offerts dans le temple. Les prêtres contrôlaient les animaux vendus et destinés à être sacrifiés, ce qui garantissait leur conformité à toutes les exigences légales.

Les changeurs eux aussi étaient indispensables car seul de l'argent pur pouvait être offert au temple, c'est-à-dire de l'argent reconnu par le temple. A l'occasion de Pâques, arrivaient à Jerusalem des Israelites du monde entier et lorsqu'arrivait le moment de l'offrande il n'avaient pas d'autre solution que de changer leur argent romain ou grec contre l'argent du temple.

Jésus a voulu avec un acte prophétique, manifester que cette façon de rendre un culte à Dieu n'était pas la bonne. Imaginez qu'une personne entre dans la sacristie d'une église, prenne le vin et les hosties et empêche qu'on dise la messe. Elle ne serait pas jugée pour s'être emparée de quelques grammes de pain et d'une petite quantité de vin, mais pour empêcher la célébration de l'Eucharistie.

Il est impossible de penser à une action spectaculaire. En ces jours de fête il pouvait y avoir huit ou dix mille personnes sur l'esplanade du temple. Qu'un homme seul avec quelques cordes puisse en évacuer une telle multitude est impensable. De plus, le temple possédait sa garde particulière chargée du maintien de l'ordre.

Et ce n'est pas tout. A l'un des coins du temple s'élevait la tour Antonia occupée par une garnison romaine. Les soulèvements contre Rome avaient toujours lieu pendant les fêtes. Pour les autorités romaines c'était des moments d'alerte maximum. N'importe quel désordre aurait été réprimé en quelques minutes.

Les textes que citent les évangélistes sont la clé pour interpréter l'évènement. Souvenons-nous que la Bible n'était pas divisée en chapitres et en versets comme maintenant. C'était une écriture continue dont les mots n'étaient pas même séparés les uns des autres. Quand on citait la Bible, on rappelait une phrase et avec elle, on faisait allusion à tout le contexte.

Les synoptiques mettent sur les lèvres de Jésus une citation de Is 56, 7: « ma maison sera une maison de prière pour tous les peuples »; et une autre de Jer 7, 11: « mais vous en avez fait une caverne de voleurs ».

Le texte d'Isaïe fait référence aux étrangers et aux eunuques qui étaient exclus du temple, et dit ensuite: « je les amènerai à ma sainte montagne et je les remplirai de joie dans ma maison de prière. Leurs sacrifices et leurs holocaustes seront les bienvenus sur mon autel, parce que ma maison sera appelée maison de prière pour tous les peuples. »

Ce que dit Isaïe, c'est que dans les temps messianiques, les eunuques et les étrangers pourront rendre un culte à Dieu. Pour le moment ils ne pouvaient dépasser le patio des gentils.

Le texte de Jérémie (Jer 7, 8-11) dit ceci: « Vous ne pouvez pas voler, tuer, commettre l'adultère, faire de faux serments, encenser Baal, courir derrière d'autres dieux et venir ensuite vous présenter devant moi, dans ce temple consacré à mon nom, en disant: « nous voilà en sécurité » et en continuant à commettre les mêmes crimes. Est-ce que vous prenez ce temple pour une caverne de bandits? »

Les bandits ne sont pas ceux qui vendent des colombes et des brebis, mais ceux qui font des offrandes sans la moindre attitude de conversion. Ils sont des bandits non pas parce qu'ils vont prier, mais parce qu'ils recherchent uniquement la sécurité. Ce que critique Jésus, c'est qu'on essaie d'acheter Dieu avec des sacrifices.

Jean procède autrement et cite un passage de Zacharie (14, 20) « Ce jour-là, on lira sur les grelots des chevaux: « consacré à Yahve », et les marmites de la maison du Yahvé seront comme des coupes d'aspersion devant l'autel; et toute marmite de Jerusalem et de Juda sera consacrée à Yahvé, et ceux qui viennent faire une offrande y mangeront et y prépareront le repas; et ce jour-là, il n'y aura plus de commerçant dans la maison de Yahvé ».

Cette inscription « consacré à Yahvé » figurait sur les grelots des sandales des prêtres et sur les marmites où l'on préparait la viande consacrée. Elle signifie que, les temps messianiques arrivés, il n'y aura plus de distinction entre choses sacrées et choses profanes, Dieu sera partout présent et tout sera sacré, c'est-à-dire ordonné au Seigneur.

Les personnes ne seront plus saintes parce qu'elles viennent prier au temple, leur sainteté sera présente dans la vie ordinaire. Dans l'Apocalypse (Ap 21,22) il est dit « Je n'ai pas vu de sanctuaire dans la ville, parce que le Seigneur tout puissant et l'Agneau étaient son sanctuaire ».

Les vendeurs interpellés (les juifs) exigent de Jésus un prodige qui avalise sa mission. Ils ne reconnaissent à Jésus aucun droit d'agir de la sorte. Ce sont eux les propriétaires et Jésus est un rival et un intrus. Ils sont accrédités par l'institution elle même et veulent savoir qui l'accrédite lui. Ce n'est pas le bien-fondé de la condamnation qui les intéresse, mais la légalité de la situation, qui les favorise. Mais Jésus leur fait comprendre que leurs lettres de créance sont caduques. Celles de Jésus seront de « rendre présente la gloire de Dieu à travers son Amour ».

Supprimez ce sanctuaire et en trois jours je le relèverai. Voilà la raison pour laquelle nous lisons le texte de Jean et non celui de Marc. Cette allusion à sa résurrection donne sens au texte au milieu du Carême.On lui demande un signe et il répond par une allusion à sa mort.

Sa mort fera de lui le sanctuaire unique et définitif. Une des raison de sa mise à mort sera qu'il est devenu un danger pour le temple. Il est intéressant de découvrir que, pour Jean, la fin des temples est liée à la mort de Jésus.

APPLICATION

Appliquer à notre vie le message de l'évangile d'aujourd'hui pourrait avoir des conséquences spectaculaires sur notre relation avec Dieu.

Si nous cessions de croire en un Dieu « qui est au ciel », nous n'irions pas le chercher dans l'église où nous nous trouvons si bien.

Si nous croyions vraiment en un Dieu qui est présent en toutes et chacune de ses créatures, nous les traiterions toutes avec autant d'attention et d'amour que s'il s'agissait de Lui.

Nous continuons à nous réfugier dans le sacré, parce que nous pensons encore qu'il y a des réalités qui n'en font pas partie. On le voit une fois de plus: le règne de l'évangile n'a toujours pas commencé.

 

Méditation – contemplation

« Ce jour-là,il n'y aura plus de commerçants dans la maison du Seigneur ».
Il est vraiment arrivé pour moi, « ce jour-là ».
Dans mes relations avec Dieu, suis-je sorti du donnant donnant?
Ai-je découvert qu'Il m'a donné tout et que j'ai à faire de même?

Mes relations avec Dieu ont pour fondement son amour total.
Il n'y a rien que je puisse demander ou attendre de Lui qui ne m'ait déjà été donné.
Je dois prendre conscience de ce don total.
Ma vie réelle sera alors réponse à ce don total.

Toutes les créatures sont une manifestation de Dieu.
L'unique Réalité, c'est Lui même.
Nous ne sommes que l'image reflétée par le miroir,
une image qui ne serait pas là si Lui n'était pas présent de l'autre coté.

 

Fray Marcos, op

(Traduction M.A.)

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